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Guadeloupe : la justice annule deux arrêtés relatifs à la chasse aux oiseaux
Par deux jugements datés du 30 septembre 2024, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé les arrêtés préfectoraux du 7 novembre 2023 relatifs à la saison de chasse 2023-2024 dans le département de la Guadeloupe et dans la collectivité de Saint-Martin, à la suite d’une action menée par l’ASPAS et un collectif d’associations*. Rappelons que ces nouveaux arrêtés avaient été scandaleusement adoptés par le préfet sous la pression des chasseurs, après que nos associations ont obtenu, en septembre 2023, la suspension des arrêtés précédents datés du 6 juillet 2023…
Dans un premier temps, le tribunal rappelle que seul le ministre chargé de la chasse dispose d’une compétence exclusive pour fixer les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau. Dès lors, le préfet est incompétent pour fixer lui-même cette période.
Par conséquent, le tribunal juge illégaux les arrêtés en tant qu’il autorisaient la chasse de nombreuses espèces de canards et de limicoles.
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Concernant la colombe à croissants (Geotrygon mystacea), le tribunal estime, pour le département de la Guadeloupe, que les données disponibles ne permettent pas d’établir avec certitude la période nidicole de l’oiseau (risque d’une période de reproduction secondaire entre octobre et décembre), ce qui devrait suffire à interdire sa chasse. Pour la collectivité de Saint-Martin, le tribunal se fonde sur le principe de précaution : les études fournies montrent que la colombe à croissants est une espèce plutôt sédentaire, qui est rare à Saint-Martin et serait sûrement classée en danger critique sur les éventuelles listes rouges du banc d’Anguilla et de Saint-Martin.
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Le principe de précaution est aussi invoqué concernant le pigeon à cou rouge (Patagioenas squamosa). Le tribunal rappelle que cette espèce est classée dans la catégorie « données insuffisantes » de la liste rouge des espèces menacées en France établie par l’UICN. Cette classification indique que son risque d’extinction n’a pas été évalué et dans ce cas, il est recommandé d’accorder aux espèces concernées le même degré de protection qu’aux taxons menacés, au moins jusqu’à ce que leur état puisse être évalué. Les études existantes confirment l’absence de données suffisantes sur l’état de conservation de cette espèce. Il ressort même d’un document auquel se réfère la Fédération de chasse que le pigeon à cou rouge est suspecté d’être en déclin à cause de la prédation, des catastrophes naturelles… et de la chasse.
Par ailleurs, le tribunal précise que l’obligation pour chaque chasseur de remplir un carnet de prélèvement ne constitue pas une garantie suffisante à la préservation de l’espèce.
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* Recours porté par l’ASFA, l’ASPAS, la LPO et TO-TI-JON
Photo d’en-tête : Pigeon à cou rouge © Ryan Mandelbaums – creative commons